mercredi 29 juin 2011

Le maître et Marguerite, Boulgakov



Ma note: 8/10

Voici la présentation de l'éditeur: Écrit sous la terreur par un homme malade et désespéré, " Le Maître et Marguerite " a mis vingt-cinq ans pour s'imposer comme l'un des chefs-d'œuvre de la littérature russe et devenir un livre culte dont la construction diabolique n'a pas fini d'enchanter les lecteurs. Comment définir un mythe ? Les personnages de ce roman fantastique sont le diable, un écrivain suicidaire, un chat géant, Jésus et Ponce Pilate, la plus belle femme du monde... On y trouve des meurtres atroces et des crucifixions. C'est une satire acerbe, une comédie burlesque, une parodie politique, un poème philosophique dévastateur avec des fantômes et des transformations magiques. Mais cette fantasmagorie baroque, ce film noir, cette vision d'apocalypse est aussi l'une des plus belles histoires d'amour jamais écrites.

Satire du système barbare de Staline, "Le maître et Marguerite" fait partie de ces chefs-d'oeuvre russes incontournables. Écrit dans un style simple mais en même temps très fluide et accrocheur, ce roman de Boulgakov vaut le détour et en plus, c'est certainement le récit le plus éclaté qu'il m'a été donné de lire. On passe de la Russie du 20e siècle aux dernières journées de Jésus Christ. Satan jouit d'une forte présence dans le roman et le chat qui parle, bien que moins réussi, rehausse encore plus le côté éclaté du roman.

Par contre, j'ai quelques réticences quant à ce roman, bien que je sache qu'il a de fortes qualités et que ses admirateurs sont prêts à tout pour le défendre. Il a une base solide de fanatiques, il suffit de faire le tour d'internet pour s'en rendre compte. Ce roman a su conquérir plusieurs générations de lecteurs.

Donc, pour les points que j'ai moins aimés, le principal est qu'on est souvent perdu dans notre lecture. Plusieurs histoires s'entremêlent, ce qui ajoute à notre confusion. Pour l'histoire de Jésus et Ponce Pilate, ça va, parce qu'on connaît les personnages et l'histoire est assez simple à saisir, surtout qu'on connaît tous un peu l'histoire de Jésus. Le début et la fin du bouquin sont aussi réussi parce que c'est intéressant à lire et on s'y retrouve assez facilement. Mon interrogation vient plutôt du milieu du récit qui lui, est assez complexe. Faut prendre le temps de bien lire. Mais aussi, je crois que cette partie est moins réussie en plus d'être complexe à saisir, comme je le disais. Il y a quelques longueurs, ce qui me fait dire que "Le maître et Marguerite" m'a déçu quelque peu, surtout avec les grandes attentes que j'avais.

Finalement, même si je sais que plusieurs ne seront pas d'accord, je finis cette lecture avec une pointe d'amertume. Pour résumer, je m'attendais à plus. Boulgakov a pris sa vie à écrire cette histoire et même si c'est réussi (en général), ce n'est pas à la hauteur des meilleurs romans de Dostoievski et de Tolstoi. Décidément, ces deux géants des lettres russes sont difficiles à supplanter. Et selon moi, Boulgakov n'y arrive pas. Désolé.

samedi 25 juin 2011

Purge, Sofi Oksanen



Ma note: 8/10

Voici la présentation de l'éditeur: En 1992, l’union soviétique s’effondre et la population estonienne fête le départ des Russes. Mais la vieille Aliide, elle, redoute les pillages et vit terrée dans sa maison, au fin fond des campagnes.
Ainsi, lorsqu’elle trouve Zara dans son jardin, une jeune femme qui semble en grande détresse, elle hésite à lui ouvrir sa porte. Ces deux femmes vont faire connaissance, et un lourd secret de famille va se révéler, en lien avec le passé de l’occupation soviétique et l’amour qu’Aliide a ressenti pour Hans, un résistant. La vieille dame va alors décider de protéger Zara jusqu’au bout, quel qu’en soit le prix. Sofi Oksanen s’empare de l’Histoire pour bâtir une tragédie familiale envoûtante. Haletant comme un film d’Hitchcock, son roman pose plusieurs questions passionnantes : peut-on vivre dans un pays occupé sans se compromettre ? Quel jugement peut-on porter sur ces trahisons ou actes de collaboration une fois disparu le poids de la contrainte ? Des questions qui ne peuvent que résonner fortement dans la tête des lecteurs français.

Chronique familiale bien ficelée, "Purge" est un roman marquant. Premièrement, après seulement quelques pages, on voit que la plume de cette jeune auteure est mature, précise et élégante. Tout est juste. Les descriptions sont bien équilibrées et l'action a un rythme convenable bien que parfois un peu lent. Les personnages sont eux aussi très bien rendus et leur profondeur est frappante. On sent qu'ils ont du vécu. Et cette expérience nous sera dévoilée tout au long du roman, et ainsi, l'action nous fera passer de l'année 1992 à la jeunesse des deux femmes pour revenir souvent à cette année 1992 où elles se rencontrent et discutent (au début du roman).

Je ne suis pas surpris que Nancy Huston ait adoré ce livre. Ce roman est proche de ce qu'elle fait comme littérature.

Aussi, j'ai bien aimé parfaire mes connaissances sur l'Estonie, un pays que nous connaissons si peu. Le communisme est à l'arrière plan, comme une ombre désenchanteresse. Sofi Oksanen parvient à faire ce que peu d'auteurs sont capables, soit de nous expliquer le réel, le concret, sans trop en faire, où la lecture est aisée et où le roman ne semble pas écrit. C'est rare une pareille réussite, surtout de nos jours, où la télé a pollué nos esprits littéraires.

Finalement, sans crier au chef-d'oeuvre, ce livre constitue une lecture essentielle. Le désarroi de ces deux femmes est perceptible et l'histoire de l'Estonie est très présente. Je ne sais pas pourquoi, mais à chaque fois que je lis un auteur du nord de l'Europe, j'y prends plaisir, j'adore. Il y a les classiques russes qui sont inégalables, les policiers suédois qui sortent de l'ordinaire et les romans contemporains de la Scandinavie qui nous donnent une leçon d'écriture bien ancrée dans notre temps. Sofi Oksanen, finlandaise, représente bien cette dernière catégorie. Une grande écrivaine dont la carrière nous réserve que de bonnes choses. J'en suis convaincu!

mercredi 22 juin 2011

Loterie solaire, Philip K. Dick



Ma note: 7,5/10

Voici la présentation de l'éditeur: Au XXIIIe siècle, n'importe qui peut accéder au pouvoir. Le dirigeant du monde, ou Meneur de Jeu, est désigné par tirage au sort. Et comme dans toute société ludique, ce sont les Règles qui régissent la vie, le hasard venant régulièrement en remettre en cause le déroulement du jeu. C'est ce que découvre Ted Benteley, un scientifique tout juste licencié, qui décide de prêter allégeance à Reese Verrik, le Meneur de Jeu. C'est ce que découvre aussi Léon Cartwright, un électronicien que la grande loterie ou « bouteille », vient de désigner comme nouveau Meneur, alors qu'il comptait quitter la terre. Deux destins contrariés, deux destins liés. car Verrik veut reprendre sa place. Benteley tombe bien...

Voici le premier roman publié de Philip K. Dick. C'est une belle entrée en matière parce qu'on retrouve plusieurs thèmes de l'oeuvre future (sans jeu de mots) de l'auteur. Aussi, l'histoire de départ est très bonne. On est dans un univers complètement régie par le hasard. L'histoire qui nous occupe traite plus particulièrement du fait que le meneur de jeu (Le président en quelque sorte) est choisi non pas pour ses compétences comme c'est le cas dans nos démocraties (je vous vois rire) mais par une loterie qui désigne le gagnant et donc, celui qui pourra gouverner. Par contre, ce même gagnant devient par le fait même l'homme à abattre et est pourchassé par un (ou des) mercenaires. Bref, c'est sur ce constat de départ que débute l'histoire. Mais cela se complique un peu par la suite. D'autres éléments de la science-fiction viennent s'ajouter.

Donc, avec ce récit, K. Dick nous dévoile le début de son oeuvre gigantesque en science-fiction. Très court (quelque 200 pages) on remarque vite que les défauts de la plupart des premiers romans remontent à la surface. Il y a trop d'informations en peu de pages et les descriptions ne sont pas assez nombreuses. Aussi, il y a un aspect "brouillon" qui se dégage de l'ensemble. On est perdu par moment, ce qui n'est pas bon signe, surtout qu'à la base ce n'est pas de la science-fiction très compliquée. Les oeuvres suivantes de cet auteur sont beaucoup mieux, à tout le moins celles que j'ai lu.

Pour terminer, j'ai bien aimé la première moitié du bouquin parce qu'il met en place cette histoire intéressante, ce monde nouveau qui s'offre à nous. Un monde contrôlé par le hasard. Par contre, la deuxième moitié est plus faible parce que là, les défauts du roman se cristallisent. Ce n'est pas un mauvais roman de Philip K. Dick mais ce n'est pas à la hauteur de ses oeuvres subséquentes. Il a écrit plusieurs chefs-d'oeuvre, mais pas ici. Dommage.

mardi 21 juin 2011

Coulez mes larmes, dit le policier de Philip K. Dick



Ma note: 8,5/10

Voici la quatrième de couverture: Ceci est l'histoire d'un homme dont tout le monde semble avoir oublié l'existence et l'identité. La veille encore, il était Jason Taverner, producteur de télévision respecté, chanteur à ses heures et idole d'au moins trente millions de téléspectateurs. Mais lorsqu'il s'éveille dans une chambre sordide un matin, il semble être le seul être humain au monde à savoir qui était - qui avait été - Jason Taverner. Ses amis, ses collaborateurs, et même Heather, sa maîtresse et complice de toujours, affirment ne jamais l'avoir rencontré. Une situation embarrassante dans un monde où les campus sont assiégés depuis vingt ans et où le défaut de papiers d'identité suffit à vous envoyer au bagne. Mais c'est un Six. Ses gènes sont spéciaux. II a des nerfs d'acier. Et si le monde entier a basculé dans la folie ou dans l'absurde, il va le remettre à l'endroit. Sous l'oeil blasé du policier sentimental.

Certes, ce roman de Philip K. Dick est moins connu du public que la plupart de ses autres bouquins, mais selon moi, il est tout aussi bon, sinon meilleur.

Je ne serai pas très long pour cette critique de peur de vous en dévoiler trop. On est aux États-Unis dans un régime totalitaire et cet élément est intéressant dans la mesure où il ajoute de la profondeur au récit. Encore une fois, les drogues sont très importantes, les univers parallèles gravitent autour du roman, la réalité altérée aussi et le domaine de la psychologie est bien intégré au genre de la science-fiction. Bref, on est en plein dans l'univers de Philip K. Dick. Un univers paranoïaque (comme l'était l'auteur) et on accélère notre lecture tout au long du roman pour en connaître au plus vite le dénouement. C'est presqu'un chef-d'oeuvre. "Ubik" n'est pas loin.

Aussi, comme dans "Rapport minoritaire" (le film en tout cas), le personnage principal est en fuite. L'action est au rendez-vous sans aucune longueur. Mais avec K. Dick, c'est de l'action intelligente, articulée et toujours parsemée de questionnement philosophique et existentiel.

Finalement, comme les autres romans de cet écrivain, on ne peut reposer le bouquin une seule seconde. Même si les personnages ne sont jamais très étoffés (avec Philip K. Dick, c'est l'histoire avant tout) on sent quand même leurs tourments et leurs désillusions face à ce monde matriciel. Donc, "Coulez mes larmes, dit le policier" est une lecture essentielle. En plus, on ne s'y ennuie pas!

dimanche 19 juin 2011

Humiliés et offensés, Dostoïevski




Ma note: 7,5/10

Voici la présentation de l'éditeur: Le premier grand roman de Dostoïevski est sans doute l'un des plus destructeurs qu'il ait écrits. C'est bien un sentiment de malaise et d'amertume qui naît de cette histoire dans laquelle le narrateur, un romancier phtisique et solitaire, aime désespérément une jeune fille qui succombe au charme d'un freluquet ; une histoire qui met en scène deux malédictions paternelles pour deux femmes qui ont fauté ; une histoire au bout de laquelle seuls les monstres seront récompensés. Malgré la noirceur des personnages, le lecteur ne pourra qu'être saisi par la force juvénile du lyrisme, par la joie pure du romancier qui s'abandonne à une intrigue sentimentale, relevée à tout instant par l'ironie la plus fine.

C'est le dernier roman de Dostoïevski qu'il me restait à lire. Écrit à son retour du bagne sibérien, on peut considérer ce livre comme un des plus sombres de l'auteur. Aussi, selon moi, c'est le plus Tolstoïen de ses romans. Il y a des similitudes avec "Anna Karénine" dans ce bouquin, notamment, l'enchaînement de scènes de moeurs qui se rapproche plus du roman-feuilleton que du roman contemporain. Il y a plusieurs scènes banales (d'après moi), ce qui en fait un roman plutôt ordinaire pour ce grand auteur (qui est mon auteur préféré).

Par contre, j'ai bien aimé plusieurs passages. Entre autres, les éléments autobiographiques de l'histoire. Le narrateur est en fait, si on s'y attarde, Dostoïevski lui-même. Le narrateur est donc un écrivain et la justesse des sentiments qu'il exprime (si on compare avec la vie de Dostoïevski) nous fait connaître davantage cet homme tourmenté.

Mais en général, je ne crois pas que "Humiliés et offensés" livre la marchandise. En tout cas, pas comme je m'y attendais. Je me suis souvent ennuyé au cours de ma lecture mais ce qui sauve la donne, c'est la plume de l'auteur et quelques passages philosophiques. Parce qu'encore une fois, la plume est accrocheuse et le roman est d'une profondeur exemplaire. Pour résumer, je pourrais dire que j'ai un point de vue plutôt partagé...

mercredi 15 juin 2011

Le Bourg de Stépantchikovo et sa population, Dostoïevski



Ma note: 7,5/10

Voici la quatrième de couverture: Par une lettre, le narrateur est invité à rejoindre son oncle de toute urgence dans le village de Stépantchikovo, où il devra épouser une jeune gouvernante qu'il n'a pourtant jamais vue. Rendu sur les lieux, il pense se trouver dans un asile de fous : l'entière maisonnée est soumise à la tyrannie imbécile d'un tartuffe de province, animé d'une haine inexpugnable envers le monde qui a fait de lui un raté. Quasiment inconnu, ce roman porté par une belle énergie comique, celle de la farce ou du théâtre de marionnettes, fut écrit en 1859 par un auteur qui, après dix ans de bagne et de relégation, revenait dans la vie littéraire et préparait en même temps deux de ses chefs-d'œuvre, Humiliés et Offensés et Les Carnets de la maison morte.

Ce n'est certainement pas le meilleur roman de Dostoïevski. Bien qu'il y ait quelques passages forts intéressants, entre autres quand le narrateur explique l'absurdité de la situation dans laquelle il se retrouve, les nombreux dialogues viennent un peu refroidir le tout. À mi-chemin entre le théâtre absurde et le roman Dostoïevskien, "Le Bourg de Stépantchikovo et sa population" exprime une certaine réalité de la vie en usant de la parodie. Mais personnellement, je préfère cet auteur quand il nous écrit des romans plus conventionnels.

Le narrateur de l'histoire est en fait un personnage secondaire de l'histoire en tant que telle. Dostoïevski utilise souvent cette technique et le résultat est toujours satisfaisant. Le narrateur est en sourdine, dans l'ombre, mais toujours présent dans les situations importantes de l'action. Dans "Les possédés", le narrateur semblait être le plus idiot des protagonistes mais ici, c'est le contraire. Le seul avec un minimum de bon sens est le neveu du personnage principal, soit le narrateur. C'est bien rendu parce que nous jugeons les personnages comme lui les juge. Ce sont de parfaits imbéciles. Ils se font manipuler grossièrement, sans subtilité et ils n'y voient que du feu.

Selon moi, on doit être un très grand admirateur de cet écrivain pour se lancer dans cette lecture. Bien que la longueur du récit soit raisonnable (quelque 400 pages), certains pourront trouver l'histoire ennuyeuse.

Finalement, on pourrait résumer l'histoire comme celle d'une secte dirigée par un gourou sans scrupule. Mais je ne vous en dis pas plus. Bonne lecture!

lundi 13 juin 2011

Les carnets du sous-sol, Dostoïevski



Ma note: 8,5/10

Voici un extrait de ce roman:
Je suis un homme malade… Je suis un homme méchant. Un homme repoussoir, voilà ce que je suis. Je crois que j’ai quelque chose au foie. De toute façon, ma maladie, je n’y comprends rien, j’ignore au juste ce qui me fait mal. Je ne me soigne pas, je ne me suis jamais soigné, même si je respecte la médecine et les docteurs. En plus, je suis superstitieux comme ce n’est pas permis ; enfin, assez pour respecter la médecine. (Je suis suffisamment instruit pour ne pas être superstitieux, mais je suis superstitieux.) Oui, c’est par méchanceté que je ne me soigne pas. ça, messieurs, je parie que c’est une chose que vous ne comprenez pas. Moi, si ! Evidemment, je ne saurais vous expliquer à qui je fais une crasse quand j’obéis à ma méchanceté de cette façon-là ; je sais parfaitement que ce ne sont pas les docteurs que j’emmerde en refusant de me soigner ; je suis le mieux placé pour savoir que ça ne peut faire de tort qu’à moi seul et à personne d’autre. Et malgré tout, si je ne me soigne pas, c’est par méchanceté. J’ai mal au foie. Tant mieux, qu’il me fasse encore plus mal !

Sans aucun doute, le roman le plus sombre de Dostoïevski et probablement un des plus sombres de la littérature du 19e siècle. Comme vous avez pu le lire dans cet extrait, un homme immensément malheureux déverse son fiel dans ce très court roman. Il est solitaire, vit en ermite dans un souterrain et il nous raconte son désespoir dans ses feuillets. Parce que ces carnets, c'est tout ce qui lui reste. Une vie ratée d'ancien fonctionnaire de 40 ans. Des tourments, des malheurs et il prend la plume pour se défouler. Et nous? Eh bien on assiste à tout cela impuissant avec une angoisse profonde tout au long du bouquin. C'est réussi. L'effet fonctionne à merveille et on ne veut plus quitter ce trop court récit.

Il y a peu de romans semblables parmi les classiques. C'est donc un roman précurseur de la littérature nihiliste du 20e siècle. Habituellement, avec cet auteur, il y a toujours un peu de lumière (souvent inspirée du christianisme) mais ici on est dans l'obscurité la plus totale de la condition humaine. On est dans les ténèbres.

Pour terminer, le seul défaut des carnets du sous-sol est sa brièveté. On peut le considérer comme la suite de la nouvelle "La logeuse" mais je n'avais pas lu cette dernière. Mais je le ferai, parce que ces carnets furent une lecture pour le moins essentielle. C'est trop court, mais oh combien intéressant !

dimanche 12 juin 2011

L'éternel mari, Dostoïevski



Ma note: 8/10

Voici la quatrième de couverture: Tandis que de sa main gauche blessée il tenait l'assassin, il se mit à chercher, en tâtonnant de la droite, le cordon du rideau : cela dura très longtemps, enfin il le saisit et l'arracha. Lui-même fut surpris, plus tard, de l'effort extraordinaire que cela nécessita. Durant ces trois minutes, ni l'un ni l'autre ne laissèrent échapper un seul mot. On n'entendait que leur respiration oppressée et le bruit sourd de la lutte. Etant enfin parvenu à ligoter les bras de Pavel Pavlovitch ramenés derrière le dos, Veltchaninov le jeta à terre, se dressa, écarta le rideau et leva le store.

Lecture fort intéressante, "L'éternel mari" m'a beaucoup fait penser au roman "Le double" du même auteur. Fondamentalement, "L'éternel mari" est la confrontation entre deux personnages, tourmentés, névrosés et à la limite de la maladie mentale. Ni réaliste, ni chimérique, ce récit est quelque part entre les deux, et comme c'est souvent le cas avec Dostoïevski, le côté sombre des personnages est le plus décrit, démontré et analysé.

Ainsi, les personnages, plus que tous autres éléments romanesques, forment l'essence du roman. Les lieux importent peu et même les personnages secondaires sont de moindre importance. Ce qui compte dans ce bouquin, c'est les deux personnages principaux, leur relation, leur confrontation.

Aussi, encore une fois, la plume (profonde) de Dostoïevski est sans égal, ce qui ajoute une puissance à ce livre.

Finalement, sans être le meilleur Dostoïevski, "L'éternel mari" s'en sort à merveille. Roman court pour cet auteur, moins de 300 pages, notre lecture, quoique très brève, ne rencontre aucune longueur. C'est bon et c'est à lire!

vendredi 10 juin 2011

Souvenirs de la maison des morts, Dostoïevski



Ma note: 8/10

Voici la présentation de l'éditeur: Traduit par Henri Mongault et Louise Desormonts. La maison des morts, c'est le bagne de Sibérie où Dostoïevski a purgé comme condamné politique une peine de quatre années de travaux forcés et six ans de " service militaire ". Mais la maison des morts, c'est aussi le Goulag. La Russie de Dostoïevski est déjà celle de Staline, de Beria, de Vychinski, des grands procès où les accusés rivalisent devant leurs procureurs de contrition et d'aveux. Comme l'écrit Claude Roy, " la Russie d'hier et la Russie moderne sont exemplaires dans la science du " châtiment "sur deux points essentiels. Elles ont poussé plus avant peut-être qu'aucun peuple l'art de donner aux tortionnaires cette paix de l'esprit que procure la bonne conscience. Elles ont su simultanément contraindre un nombre important de leurs victimes, non seulement à subir sans révolte les épreuves infligées, mais à donner à leurs tourmenteurs un total acquiescement. "

Voici un roman un peu différent de ce que le maître nous a habitué. Par maître j'entends bien sûr Fedor Dostoïevski. Différent, parce que c'est davantage un récit autobiographique même si l'auteur essaie de nous le présenter comme un roman, en interposant les narrateurs au tout début du bouquin. En résumé, un homme découvre des carnets d'un ancien forçat et c'est là que débute réellement l'histoire. On entre donc dans l'univers des bagnes de Sibérie (l'ancêtre des goulags en quelque sorte).

Je crois qu'il y a deux prérequis pour bien apprécier ce roman. Il faut tout d'abord être un grand admirateur de Dostoïevski mais aussi, l'envie de connaissances doit nous titiller parce qu'il n'y a pas vraiment d'intrigue dans ce récit. La description des lieux est légions tout comme la description des personnages. On pénètre dans ces bagnes et on assiste à toutes sortes d'échanges entre les différents occupants et ainsi, la vie dans ces bagnes nous est dévoilée. La profondeur des personnages devient vite importante, parce que c'est précisément cet élément qui nous fera passer un agréable moment de lecture même si cet univers est rempli de misère et de tourments.

Alors, pour terminer, j'ai beaucoup aimé ce bouquin, mais la faiblesse de l'intrigue, même si c'est voulu par l'écrivain, nous rend ce récit quelque peu lassant par moment. Même si les conditions de vie des personnages sont difficiles, ce n'est pas seulement du pessimisme qui se dégage de l'histoire. Il y a aussi de la lumière et selon moi, c'est loin d'être le plus nihiliste des romans de Dostoïevski. J'ai aimé en savoir plus sur ces "prisons" de Sibérie et qui de mieux que le maître russe pour nous le partager. En plus, Dostoïevski sait de quoi il parle, il l'a vécu. À vous de le lire maintenant!

lundi 6 juin 2011

Les pauvres gens, Dostoïevski



Ma note: 8/10

Voici la présentation de l'éditeur: Les Pauvres Gens est le premier roman publié par Dostoïevski, celui qui le rendit d'emblée célèbre. Il a raconté comment l'idée lui en était venue : en se promenant un soir d'hiver dans Pétersbourg. Toute la ville lui apparut comme une rêverie fantastique. " C'est alors que m'apparut une autre histoire, dans quelque coin sombre, un cœur de conseiller titulaire, honnête et pur, candide et dévoué à ses chefs, et avec lui, une jeune fille, offensée et triste, et leur émouvante histoire me déchira le cœur. " Toute la littérature du XXe siècle est dans la dernière phrase : " Vous savez, je ne sais même plus ce que j'écris, je ne sais plus rien, je ne me relis même pas, je ne me corrige pas. J'écris seulement pour écrire, pour m'entretenir avec vous un peu plus longtemps... "

J'étais impatient de débuter cette lecture, parce que ce roman est le premier du génial Dostoïevski, écrit à seulement 25 ans. Je ne fut pas déçu, loin de là. C'est sans aucun doute un des meilleurs premiers romans qu'il m'ait été donné de lire. On voit rapidement qu'il a un talent naturel et ce premier roman semble avoir été écrit minutieusement par l'auteur, ce qui n'est pas toujours le cas avec Dostoïevski. Bien que très court, ce bouquin nous fait vivre de fortes émotions.

Les thèmes abordés sont principalement la pauvreté matérielle (et les conséquences qui s'ensuivent, telle la maladie), le partage et l'affection d'un vieil homme pour une jeune femme. La misère est présente tout au long du récit et selon moi, il est très inspiré des écrivains français du début du 19e siècle. Pas étonnant qu'avant ses 25 ans (et donc avant l'écriture de ce roman) Dostoïevski traduisait déjà des romans français.

Cependant quelques petits défauts viennent porter ombrage à la réussite de l'ensemble. Entre autres, les plaintes des deux personnages principaux peuvent devenir redondantes, surtout vers la fin. C'est presque toujours la même chose, ils n'ont pas d'argent mais font tout en leur pouvoir pour partager avec l'autre le peu qu'ils trouvent. Mais la force de Dostoïevski, son style d'écriture, ressort plus que tout et nous procure une séance de lecture plus qu'intéressante.

Alors, pour découvrir la naissance d'un génie des lettres, on se doit de lire "Les pauvres gens", le premier roman de Fiodor Dostoïevski. Cet auteur est la preuve de l'existence de Dieu mais pour un athée comme moi, Dostoïevski est tout simplement Dieu lui-même!

dimanche 5 juin 2011

Le livre de sable, Jorge Luis Borges



Ma note: 8,5/10

Voici la présentation de l'éditeur: Ce livre comporte treize nouvelles. Ce nombre est le fruit du hasard ou de la fatalité - ici les deux mots sont strictement synonymes - et n'a rien de magique. Si de tous ces écrits je ne devais en conserver qu'un seul, je crois que je conserverais Le congrès, qui est à la fois le plus autobiographique (celui qui fait le plus appel aux souvenirs) et le plus fantastique. J'ai voulu rester fidèle, dans ces exercices d'aveugle, à l'exemple de Wells, en conjuguant avec un style simple, parfois presque oral, un argument impossible. Le lecteur curieux peut ajouter les noms de Swift et d'Edgar Allan Poe. Je n'écris pas pour une petite élite dont je n'ai cure, ni pour cette entité platonique adulée qu'on surnomme la Masse. Je ne crois pas à ces deux abstractions, chères au démagogue. J'écris pour moi, pour mes amis et pour adoucir le cours du temps.

Je ne suis pas un grand lecteur de nouvelles littéraires. Certes, j'ai lu quelques recueils dans ma vie, mais je n'ai jamais lu ce genre de nouvelles (celles de Borges en particulier). Et bien, je dois dire que cet écrivain au talent immense m'a donné le goût des courtes histoires. Ce fut une lecture merveilleuse, intrigante et on en sort changé.

Bien que très courts (un peu trop), la plupart des récits de ce recueil sont de petits bijoux littéraires. L'écrivain parvient à dire beaucoup en peu de mots. Quelques nouvelles sont de pures chefs-d'oeuvre comme la première du bouquin, "L'autre" et aussi, "Utopie d'un homme qui est fatigué". Dans "L'autre", un vieil homme (Borges) rencontre et discute avec un jeune homme qui est nul autre que lui-même. C'est succulent. Dans "Utopie d'un homme qui est fatigué", un homme égaré dans un pays discute avec un étranger qui est en réalité un homme du futur qui lui explique les coutumes d'une époque lointaine. Même si chaque nouvelle du recueil se termine trop rapidement (elles ne font que quelques pages chacune), elles ont toutes un petit quelque chose d'agréable et de mystérieux.

Donc, voici une lecture des plus agréables où chaque lecteur y trouvera probablement son compte. C'est court mais puissant. Le temps est présent tout au long du livre. Lisez-le, c'est le meilleur conseil que je puisse vous donnez.

samedi 4 juin 2011

Moby Dick, Herman Melville



Ma note: 9/10

Voici la présentation de l'éditeur: Avec Moby Dick, Melville a donné naissance à un livre-culte et inscrit dans la mémoire des hommes un nouveau mythe : celui de la baleine blanche. Fort de son expérience de marin, qui a nourri ses romans précédents et lui a assuré le succès, l'écrivain américain, alors en pleine maturité, raconte la folle quête du capitaine Achab et sa dernière rencontre avec le grand cachalot. Véritable encyclopédie de la mer, nouvelle Bible aux accents prophétiques, parabole chargée de thèmes universels, Moby Dick n'en reste pas moins construit avec une savante maîtrise, maintenant un suspense lent, qui s'accélère peu à peu jusqu'à l'apocalypse finale. L'écriture de Melville, infiniment libre et audacieuse, tour à tour balancée, puis hachée au rythme des houles, des vents et des passions humaines, est d'une richesse exceptionnelle. Il faut remonter à Shakespeare pour trouver l'exemple d'une langue aussi inventive, d'une poésie aussi grandiose.

Récit épique, époustouflant et remarquablement bien écrit, "Moby Dick" est sans aucun doute le chef-d'oeuvre du roman américain. Mort en même temps que l'auteur, cet incroyable roman fut redécouvert aux environs de 1920 et depuis il ne cesse d'être étudié, analysé et lu avec délectation par les littéraires de partout sur la planète. Pour ma part, ce fut une joie immense de me plonger pour la première fois dans ce grand classique.

Par contre, ce roman pourra sembler lourd pour certains lecteurs. En effet, l'auteur place souvent son récit sur pause pour nous transmettre ses connaissances dans le domaine maritime et des cétacés. Il y a donc de longs moments encyclopédiques. Personnellement, j'ai bien aimé en apprendre un peu plus dans ces domaines mais plusieurs vous diront le contraire. En plus, le roman est très long, quelque 800 pages, ce qui pourra en rebuter plus d'un, mais encore une fois, pour moi, la lecture d'un long roman bien écrit est toujours un plaisir.

Parlons donc de cette plume. En résumé, elle est tout simplement parfaite. Les descriptions sont nombreuses mais toujours intéressantes. Les métaphores parcours le roman du début à la fin et les références philosophiques et spirituelles sont fréquentes. L'auteur a un tel talent qu'on se demande comment il a pu être oublié pendant si longtemps après sa mort.

Un autre point fort du roman est la profondeur des personnages. On s'accroche au narrateur mais aussi au capitaine et aux autres protagoniste de l'histoire (celle du baleinier). La baleine Moby Dick est presque toujours en arrière plan dans le roman et ceci nous intrigue tout au long de notre lecture.

Finalement, voici une lecture incontournable. On ne peut être littéraire sans avoir lu "Moby Dick". C'est une lecture essentielle, notamment si on aspire à devenir écrivain. Parce qu'avant tout, ce roman est une leçon absolue d'écriture. La perfection n'est pas loin. Merci M. Melville !