Ma note :
8/10
Voici la quatrième de couverture: Comment trois lycéens plutôt doués et un jeune ouvrier ambitieux en viennent-ils à molester les passants pour les voler. Comment Rainer, le plus brillant, l'idéologue de la bande finira-t-il par assassiner toute sa famille. Avec une froideur qui renchérit sur celle de ses jeunes héros et une distance ironique qui reconstruit l'insoutenable, Elfriede Jelinek dénonce une nouvelle fois la difficulté de vivre sans étouffer dans l'Autriche d'après-guerre. A la détermination d'une société pressée d'oublier le passé et à qui la réussite sociale tient lieu de valeur suprême répondent le dégoût et la haine des quatre adolescents. Inspiré par un fait divers qui épouvanta Vienne, ce roman semble prémonitoire si l'on pense à plusieurs affaires récentes aussi douloureuses qu'inexplicables.
J'ai rencontré le nom Jelinek, pour la première fois, quand elle avait gagné le prix Nobel de littérature en 2004. Le comité du Nobel avait très bien décrit sa littérature en disant qu'il l'avait récompensé pour « le flot de voix et de contre-voix dans ses romans et ses drames qui dévoilent avec une exceptionnelle passion langagière l’absurdité et le pouvoir autoritaire des clichés sociaux. » Quelque temps plus tard, j'ai revu le nom Jelinek en lisant "Professeur de désespoir" de Nancy Huston. Celle-ci la décrivait comme étant la plus nihiliste des nihilistes, la plus pessimiste en somme. J'ai donc lu un peu plus tard "Enfants des morts" et son talent m'avait sauté en plein visage. Je continue donc sur ma lancé avec, cette fois-ci, "Les exclus".
Encore une fois j'ai adoré, même s'il n'arrive pas tout à fait à la hauteur d'"Enfants des morts". La traduction est un peu plus faible que ce dernier et l'histoire est davantage sociologique. On est moins dans la métaphysique, dans le nihilisme philosophique mais davantage dans le nihilisme anarchique, au niveau des phénomènes (de la vie matérielle). "Les exclus", ce sont des vivants qui attaquent alors que dans "Enfants des morts" c'était des morts qui revenaient à la vie pour attaquer les vivants. Je considère qu'"Enfants des morts" sortait plus de l'ordinaire. Mais les deux romans sont très violents, parmi les plus crus que j'ai lus. Et certainement parmi les plus décontenançant. La voix de Jelinek est très originale. Elle part dans tous les sens, sans jamais vraiment s'arrêter, sans lâcher-prise. C'est littéralement une écrivaine de génie et elle est pour moi ce que j'ai lu de mieux depuis plusieurs années avec les Roberto Bolano, Cormac McCarthy et Herta Müller, entre autres.
L'auteur nous introduit aussi à Sartre et Camus, le temps de quelques passages délectables sur ces deux grands auteurs. (De Camus elle dit même qu'il est sur-nihiliste, en ce sens qu'il a une philosophie du néant dans le néant. Qu'il voit l'absurdité dans le néant alors que le message de Jelinek semble être de voir une certaine rationalité, un système dans le néant.)
Mais par-dessus tout, ce qui frappe dans le roman, ce sont les personnages. La facilité avec laquelle ils commettent leurs gestes ultra-violents. On ne sort pas indemne de cette lecture même si le roman n'est pas de la trempe d'"Enfants des morts".
Depuis que j'ai découvert son nom lors de la remise du Nobel, je me tâte pour la lire ou non. Je pense qu'un jour ou l'autre je vais finir par y venir, mais j'ai un peu peur, cela a l'air d'une littérature très dure. Bon je la note dans mon carnet, ce qui permet d'espérer une lecture d'ici un an ! Merci pour ce billet qui me redonne envie !
RépondreEffacerÇa me fait plaisir Nathalie. Pour ma part, j'aime mieux les auteurs qui se démarquent des autres comme Jelinek. Et en plus, j'aime beaucoup la littérature nihiliste parce que ce sont tous (ou à peu près) des héritiers de Schopenhauer (mon philosophe préféré). En tout cas, j'ai hâte de lire ton futur billet sur Jelinek.
RépondreEffacerÀ bientôt !