mardi 2 juillet 2013

La contrevie, Philip Roth



Ma note: 7,5/10

Voici la quatrième de couverture: La contrevie est le roman d'hommes et de femmes qui réalisent leur rêve de prendre un nouveau départ et d'échapper au cours censément irréversible de la destinée - parfois au péril de leur vie. Où qu'ils se trouvent, ces personnages se laissent tenter par la perspective d'une existence de rechange, à rebours de la voie tracée. La conscience du romancier Nathan Zuckerman éclaire ces vies en transit et nous fait visiter les paysages du livre, familiers ou lointains mais toujours riches de sens. Sa vision d'ensemble, son intelligence sceptique évaluent le prix à payer pour qui veut réécrire son destin personnel ou infléchir l'histoire, que ce soit dans le cabinet dentaire d'une banlieue résidentielle du New Jersey, un village ancestral du Gloucestershire, une église du West End à Londres, ou une minuscule colonie israélienne en Cisjordanie.

Selon moi, "La contrevie" est un roman plutôt moyen de Philip Roth. Le roman commence de cette façon : Nathan Zuckerman, écrivain et personnage récurrent chez Roth, doit écrire l'éloge funèbre de son frère décédé. Mais il n'y parvient pas. L'écrivain Zuckerman est davantage tenté, comme chaque auteur, de raconter cette vie de façon autofictionnelle. Et la vie d'Henry, le frère de Nathan, c'est Philip Roth qui commence à nous la raconter dans les premières pages du récit, avec un chapitre écrit à la troisième personne, entrecoupé d'un récit découvert parmi un vieux journal intime qu'il tenait sur Henry. Ensuite, on assiste à la rencontre de Nathan, au moment des funérailles, avec des connaissances d'Henry. (C'est le talent de Roth d'esquisser une peinture de la vie américaine par le truchement de la biographie des personnages). Le deuxième chapitre est écrit à la première personne, par Nathan Zuckerman, qui se retrouve en Israël (il y rencontre même le Premier ministre). Zuckerman (Roth?) parle de sa condition de juif, et aussi, de la condition mondiale des Juifs. Nathan est en fait sur les traces de son frère dentiste (le même Henry) avant qu'il ne meurt. Roth en profite pour critiquer les Juifs au passage comme il le fait souvent dans ses romans (il est lui-même juif soit dit en passant). Il retrouve un frère complètement changé après avoir eu des problèmes cardiaques. Nathan reprend ensuite l'avion pour écrire à Henry.

Je ne peux m'aventurer plus loin dans l'histoire parce que j'en dirais trop. Ce roman offre quelques surprises. Disons simplement qu'il est question d'attentats terroristes, le thème du judaïsme (et du sionisme) et d'Israël revient plusieurs fois, des relations de Nathan et d'Henry (une sorte de rivalité s'installe) et pour la forme, on y retrouve différentes narrations (avec différents narrateurs), de la métafiction (des mises en abyme), les rôles des personnages changent (et pas à peu près), etc. On est presque dans le recueil de nouvelles. Et aussi, je dirais que c'est le roman de Philip Roth (j'en ai lu une vingtaine) qui se rapproche le plus de l'oeuvre de Paul Auster. Mais contrairement à lui, Roth n'a pas réécrit sans cesse le même roman comme Auster l'a fait. La plupart des critiques s'entendent ainsi pour dire que Philip Roth est un meilleur écrivain.

Nathan Zuckerman est selon moi le personnage de Roth le plus intéressant (ce qui inclut Mickey Sabbath). C'est l'alter ego littéraire de Roth qui lui ressemble le plus. Par contre, pour "La contrevie", l'auteur n'a pas une idée forte comme pour "La tache" (l'identité) et "Pastorale américaine" (le terrorisme et sa relation avec la famille stéréotypée américaine). Ici, il n'y a rien de vraiment intéressant qui solidifie le socle du roman. Parce qu'au fond, quel est le thème dominant de "La contrevie" ? Le pouvoir de la création ? Le judaïsme ? La vie de quotidienne des Zuckerman (de Philip Roth) ? Les thèmes de Roth sont souvent accrocheurs, mais pour le présent roman, ils m'ont ennuyé.

  Pour conclure, attardons-nous un peu sur le style d'écriture de cet auteur (qui lui, est toujours réussi). Avec Philip Roth, ce n'est pas la beauté de la prose qui se démarque, qui nous enchante. C'est davantage l'ensemble de l'oeuvre ; il a un souffle, sa plume est rythmée, etc. Ainsi, par ses romans, Philip Roth ne réussit peut-être pas à nous toucher par la beauté de l'art romanesque, mais il parvient certainement à toucher notre esprit. Malgré un roman avec plusieurs défauts, c'est quand même une bonne lecture.

2 commentaires:

  1. Pour le coup je suis plutôt d'accord avec ta critique, ce roman manque effectivement d'unité et c'est probablement l'absence d'un fil directeur fort qui m'a rendu cette lecture si fastidieuse.
    Il semblerait pourtant que tu aies bien plus apprécié cette lecture que moi. je ne connaissais pas P.Roth et je ne pense pas retenter l'aventure tout de suite si je dois apprendre que le judaïsme est un thème récurrent de son œuvre. J'ai trouvé tout ce passage irritant, répétitif et profondément sectaire.

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  2. En tout cas si tu le relis je te conseille ces trois-là : "La tache", "Pastorale américaine" et "Le théâtre de Sabbath".

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