mardi 29 mai 2012

Tuer le père, Amélie Nothomb


Ma note: 7/10

Voici le peu d'information que l'on retrouve en quatrième de couverture: « Allez savoir ce qui se passe dans la tête d’un joueur. » Amélie Nothomb est née à Kobé en 1967. Dès son premier roman Hygiène de l’assassin paru en 1992, elle s’est imposée comme un écrivain singulier. En 1999, elle obtient avec Stupeur et tremblements le Grand Prix de l’Académie française. Tuer le père est son 20e roman.

Je commence la lecture d'une série de romans d'Amélie Nothomb avec "Tuer le père". J'en ai lu quelques-uns de cette écrivaine - qui peut se vanter d'avoir une armée de fans - et sans crier au génie, j'avais bien aimé. Ce sont de très courts romans - en fait ce sont des novellas - et son style est accrocheur, tout comme ses histoires, sa façon de raconter. Pour celui-ci, c'est exactement ce qu'on a. Et comme les autres, il se lit rapidement, en quelques heures seulement.

Je ne m'étais pas documenté sur l'histoire avant de le lire et je n'avais surtout pas fait l'erreur de lire les critiques (je ne l'ai toujours pas fait au moment d'écrire ces lignes). Le titre est assez révélateur de l'histoire. Aussi, l'auteure raconte son histoire et dans celle-ci elle raconte l'histoire qu'elle s'est fait raconter, celle de deux adversaires, et recule donc plusieurs années avant. On commence le bouquin avec une mise en abyme plutôt réussi, qui n'a rien à envier à un Paul Auster, par exemple. Quant à l'histoire qu'elle nous raconte, le tout est très intéressant et bien ficelé. Globalement, on pourrait dire qu'elle aborde un thème original, soit le complexe d'oedipe mais avec une relation père et fils spirituelles. Je ne vous en dis pas plus.

Alors, pour terminer, je ne peux lui donner une meilleure note parce qu'il est tellement court, que chaque thème est effleuré mais sans plus. Nothomb, même si je ne suis pas son plus grand fan, à un don certain pour les courtes histoires et elle est une excellente conteuse. Sa force - comme sa faiblesse aussi - est de faire court. Sur certains points, cela est plaisant mais ses livres restent un divertissement. Ce n'est certainement pas de la grande littérature mais on s'amuse et l'on se questionne, malgré tout. Par contre, je crois qu'on a vite oublié - et qu'on passe à autre chose - après avoir lu ses romans.

Lors de mes prochaines critiques je pourrai comparer si "Tuer le père" fait partie de ses meilleurs ou de ses pires.

vendredi 25 mai 2012

Le chuchoteur, Donato Carrisi

Ma note: 7/10

Voici la quatrième de couverture: Cinq petites filles ont disparu. Cinq petites fosses ont été creusées dans la clairière. Au fond de chacune, un petit bras, le gauche. Depuis qu’ils enquêtent sur les rapts des fillettes, le criminologue Goran Gavila et son équipe d’agents spéciaux ont l’impression d’être manipulés. Chaque découverte macabre, chaque indice les mènent à des assassins différents. La découverte d’un sixième bras, dans la clairière, appartenant à une victime inconnue, les convainc d’appeler en renfort Mila Vasquez, experte dans les affaires d’enlèvement. Dans le huis clos d’un appartement spartiate converti en QG, Gavila et ses agents vont échafauder une théorie à laquelle nul ne veut croire : tous les meurtres sont liés, le vrai coupable est ailleurs. Quand on tue des enfants, Dieu se tait, et le diable murmure…

Chose rare pour moi, cela fait deux romans policiers que je lis dans la même semaine. Comme je le disais dans ma précédente critique, ce genre est maintenant rendu à un point où chaque roman se ressemble et où aucun auteur n'a su dépasser la reine du genre, j'ai nommé Agatha Christie. Pour celui-ci, "Le chuchoteur" on est encore une fois dans les mêmes eaux, où la plume aseptisée rencontre les nombreux clichés. Même si le roman en lui-même m'a plu (surtout la fin de l'histoire), je dois dire qu'il s'adresse, comme les autres romans du genre, aux grands lecteurs de romans policiers.

Avec Donato Carrisi - que je lisais pour la première fois - on est en plein dans le roman noir, le polar à son plus ténébreux. Il n'y a pas vraiment de détective en particulier qui ressort du lot (contrairement à plusieurs autres romans policiers où un inspecteur, le plus souvent, prend le contrôle de l'enquête jusqu'à son dénouement final et où il nous explique sa découverte). Et bien non. Ici, c'est un travail d'équipe où l'enquête débute dès les premières pages et où les revirements seront légions.

Une critique que je pourrais faire à ce roman est son absence de territoire en ce sens qu'il n'habite aucune région en particulier, en tout cas pas au point de nous transporter vers une région (Européenne?) que nous, Américains du nord, connaissons moins. Un peu comme le font à merveille les polars scandinaves. Bien sûr que le tout est très italien mais l'auteur ne la décrit pas assez cette région. Dans ce roman, c'est surtout l'enquête qui importe et le reste, ce qui fait le charme des néo-polars, (comme la critique sociologique, l'environnement où évolue l'enquête et la force des personnages principaux (leur psychologie, leurs tourments, leur profondeur)) sont pour le moins effacés.

Alors, pour terminer, la force de ce bouquin est l'enquête bien ficelée, même s'il y a facilement 100 pages de trop (dans le milieu du récit) et ce qu'on apprend sur une facette des tueurs en série (l'auteur est bien documenté). Par contre, en général, on a droit à un autre roman policier très semblable à ce qui se publie sur le marché. Pour cela, c'est raté.

dimanche 20 mai 2012

Pars vite et reviens tard, Fred Vargas


Ma note: 6,5/10

Voici la quatrième de couverture : Qui glisse des annonces incompréhensibles dans la boîte à messages du Crieur de la place Edgar- Quinet ? Est-ce l’oeuvre d’un fou ? D’un maniaque ? Ou encore d’un pervers impuissant qui cherche à établir son pouvoir en enfonçant l’homme de la rue dans son inculture crasse ? Un retraité lettré, “conseiller en choses de la vie”, et le commissaire Jean-Baptiste Adamsberg trouvent ces messages souterrains, putrides et dangereux. Et pour cause. Ce sont des annonces de mort, de destruction générale, de catastrophe : elles annoncent la peste. Lorsque d’étranges signes tracés à la peinture noire font leur apparition sur des portes d’appartements, le dispositif est en place. Le cauchemar peut commencer. Personnages sortis de nulle part, intrigue passionnante, dialogues jubilatoires… Auteure inspirée, Fred Vargas ne se rattache décidément à aucun courant et détourne avec brio les conventions du genre.

Cela faisait longtemps que je n'avais lu un roman policier. Ma principale critique vis-à-vis ce genre en particulier, c'est que chaque roman se ressemble trop, peu importe l'auteur, peu importe le genre de policier. J'avais bien aimé Stieg Larsson et ses Millennium parce qu'ils sortaient un peu du lot avec une véritable critique sociologique et psychologique. Ici, avec "Pars vite et reviens tard", on est en face d'un roman plutôt conforme aux règles du policier - contrairement à Stieg Larsson - et sur ce point il est décevant.

Par contre, ce n'est pas du tout un mauvais polar. L'histoire de départ est intéressante et le fait que l'assassin transmet la peste à ses victimes est fort original. Fred Vargas n'a pas inutilement rallongé son récit comme plusieurs auteurs de ce genre ont tendances à faire. Elle reste à l'essentiel et l'intrigue tient la route, à l'exception peut-être de la fin qui ne m'a pas du tout convaincu. L'incongruité de la chute m'a déçu et l'on sort de l'histoire sans être attaché aux personnages. Mais ce qui me tracasse le plus avec ce genre de roman policier c'est que leurs auteurs sont à peu près tous sur le pilote automatique. Le seul auteur avec un réel talent de conteur c'est Agatha Christie. Depuis ce temps, personne ne l'a égalé et le genre tourne en rond. Il n'y a plus de surprise et les écrivains semblent avoir de la difficulté à bien ficeler leur intrigue. La reine Christie est imbattable.

Pour terminer, je ne crois pas que Vargas ait un style d'écriture qui sort de l'ordinaire. Elle n'est ni pire ni meilleure que les autres. Mais personnellement je préfère les polars scandinaves. Ils sont souvent traduits en français international alors que Fred Vargas écrit comme la plupart des autres écrivains français, soit en français très fanco-France, ce qui est difficile d'embarquer pour un Québécois comme moi. Aussi, les Scandinaves sont meilleurs pour recréer l'ambiance inquiétante qui est de mise pour un thriller-policier. Bref, Fred Vargas n'est certainement pas mon écrivain de policier préféré, même si tout n'est pas raté dans "Pars vite et reviens tard".

dimanche 13 mai 2012

Les Misérables, Victor Hugo


Ma note: 10/10

Voici la quatrième de couverture des deux volumes: Tant qu'il existera, par le fait des lois et des moeurs, une damnation sociale créant artificiellement, en pleine civilisation, des enfers, et compliquant d'une fatalité humaine la destinée qui est divine; tant que les trois problèmes du siècle, la dégradation de l'homme par le prolétariat, la déchéance de la femme par la faim, l'atrophie de l'enfant par la nuit, ne seront pas résolus ; tant que, dans de certaines régions, l'asphyxie sociale sera possible ; en d'autres termes, et à un point de vue plus étendu encore, tant qu'il y aura sur la terre ignorance et misère, des livres de la nature de celui-ci pourront ne pas être inutiles. (Victor Hugo)
Ce livre est un livre de charité, c'est-à-dire un livre fait pour exciter, pour provoquer l'esprit de charité, c'est un livre d'une nature terrible et navrante, disant à la conscience du lecteur: " Eh bien? Qu'en pensez-vous ? Que concluez-vous ? " Les Misérables sont un étourdissant rappel à l'ordre d'une société trop amoureuse d'elle-même et trop peu soucieuse de l'immortelle loi de fraternité, un plaidoyer pour Les Misérables (ceux qui souffrent de la misère et que la misère déshonore), proféré par la bouche la plus éloquente de ce temps. Le nouveau livre de Victor Hugo doit être le Bienvenu (comme l'évêque dont il raconte la victorieuse charité), le livre à applaudir, le livre à remercier. N'est-il pas utile que de temps à autre le poète, le philosophe prennent un peu le Bonheur égoïste aux cheveux, et lui disent, en lui secouant le mufle dans le sang et l'ordure: " Vois ton œuvre et bois ton œuvre " ? (Charles Baudelaire)

Je replongeais dans ce gigantesque roman de 2000 pages pour la troisième fois, juste après en avoir lu plusieurs tout aussi longs, ou presque. J'avais lu "Freedom" de Jonathan Franzen, "Vie et destin" de Vassili Grossman et surtout "La guerre et la paix" de Tolstoï. Pour ce dernier, on peut faire plusieurs parallèles avec "Les misérables" d'Hugo. Ils ont tous les deux le même nombre de pages, ils ont été publié presqu'en même temps, et ces deux romans magnifiques du 19e siècle occupent une place centrale dans l'histoire de la littérature mondiale. Même si l'histoire de ces deux livres est très différentes, on sort transformé par ces lectures.

L'adaptation cinématographique que j'avais vue pour le présent roman mettait surtout l'accent sur la poursuite que Javert faisait de Jean Valjean. Quant au roman lui-même, il ne réserve pas une place si grande à cette intrigue en particulier. Je crois que tout est dans le début du roman, lorsque monseigneur Bienvenu aide Jean Valjean à se sortir de la misère. À lui donner un peu de bonté. Et le message d'Hugo est là, précisément là. Avec un peu de compassion, Jean Valjean se retrouvera changé et les répercussions sur les gens qu'il rencontrera se feront sentir. Et pour le mieux. "Les misérables" sont donc un roman socialiste, mais non communiste. Victor Hugo traite même de ce sujet d'un point de vue sociologique et philosophique dans le roman sans passer par la fiction du début jusqu'à la fin. En effet, le roman n'est pas linéaire, contrairement aux adaptations cinématographiques, théâtrales, etc. Plusieurs longues parties dans le corpus nous entretiennent de différents sujets et jamais notre intérêt n'est affaibli. Le tout est fait par un écrivain de génie, qui manie la langue d'une rare élégance. C'est surtout cela qui se dégage du roman "Les misérables". Une perfection dans la poésie de la prose.

Hugo est un grand poète! Et ce roman est sans contredit un de mes préférés à vie. C'est le meilleur livre français de tous les temps. C'est aussi une lecture plus qu'essentielle. C'est une lecture divinatoire.

mardi 1 mai 2012

Vie et destin, Vassili Grossman


Ma note: 8/10

Voici la quatrième de couverture : Dans ce roman-fresque, composé dans les années 1950, à la façon de Guerre et paix, Vassili Grossman (1905-1964) fait revivre l'URSS en guerre à travers le destin d'une famille, dont les membres nous amènent tour à tour dans Stalingrad assiégée, dans les laboratoires de recherche scientifique, dans la vie ordinaire du peuple russe, et jusqu'à Treblinka sur les pas de l'Armée rouge. Au-delà de ces destins souvent tragiques, il s'interroge sur la terrifiante convergence des systèmes nazi et communiste alors même qu'ils s'affrontent sans merci. Radicalement iconoclaste en son temps - le manuscrit fut confisqué par le KGB, tandis qu'une copie parvenait clandestinement en Occident -, ce livre pose sur l'histoire du XXe siècle une question que philosophes et historiens n'ont cessé d'explorer depuis lors. Il le fait sous la forme d'une grande œuvre littéraire, imprégnée de vie et d'humanité, qui transcende le documentaire et la polémique pour atteindre à une vision puissante, métaphysique, de la lutte éternelle du bien contre le mal.

Quelle fût ma surprise - désagréable - de découvrir, dans la préface, que ce roman est en fait la suite d'un précédent roman que je n'avais point lu. Par contre, comme il est fait mention dans cette préface, il n'est pas du tout requis de lire la première partie. Entre autres, parce que "Vie et destin" est construit différemment de la plupart des romans du 20e siècle. On voit rapidement que Grossman s'inspire des classiques du 19e siècle où les "scènes" prenaient une place importante dans la narration et surtout dans la forme d'un roman. Les auteurs pensaient en "scènes", ce que fait Vassili Grossman et plus particulièrement, on voit qu'il s'inspire de Tolstoï en ce sens qu'il n'y a pas vraiment de commencement ni de fin au roman. Aussi, il ajoute quelque touche de philosophie (au sens classique (et large) du terme) par des passages très intéressants. L'histoire des idées semble importante pour cet auteur.

Énorme bouquin de plus de 1000 pages, "Vie et destin" n'offre pas vraiment de longueur. Cependant, les personnages sont trop nombreux et cela m'a quelque peu dérangé parce que l'on peine à s'identifier à eux. Là où Tolstoï excellait en créant son Pierre de "Guerre et paix" (à la perfection), Grossman est moins habile en tant que romancier et on se retrouve donc avec une histoire très crédible sur le plan historique (l'auteur est allé au front en tant que journaliste lors de la 2e guerre mondiale) mais avec un tout plutôt moyen. La raison en est peut-être qu'il y a trop d'action et l'on a du mal à reprendre notre souffle lors des courts moments de philosophie.

Alors, en conclusion, malgré de grandes ressemblances avec "Guerre et paix", je ne crois pas que "Vie et destin" aura tenu ses promesses avec toutes les critiques dithyrambiques que j'avais lues à son sujet. J'ai bien aimé mon moment de lecture, mais je crois qu'un livre d'histoire sur Stalingrad, la deuxième guerre mondiale et sur les bolcheviks aurait fait le travail aussi. Mais bon, la forme et la narration romanesque sont toujours plus faciles à lire qu'un livre d'histoire et sur ce point, voilà un roman qui pourra plaire à un grand nombre de lecteurs.