mercredi 3 avril 2013

La montagne magique, Thomas Mann



Ma note: 6,5/10

Voici la présentation de l'éditeur: Un jeune homme, Hans Castorp, se rend de Hambourg, sa ville natale, à Davos, en Suisse, pour passer trois semaines auprès de son cousin en traitement dans un sanatorium. Pris dans l'engrenage étrange de la vie des "gens de là-haut" et subissant l'atmosphère envoûtante du sanatorium, Hans y séjournera sept ans, jusqu'au jour où la Grande Guerre, l'exorcisant, va le précipiter sur les champs de bataille. Chef-d'oeuvre de Thomas Mann, l'un des plus célèbres écrivains allemands de ce siècle, La Montagne magique est un roman miroir où l'on peut déchiffrer tous les grands thèmes de notre époque. Et c'est en même temps une admirable histoire aux personnages inoubliables que la lumière de la haute montagne éclaire jusqu'au fond d'eux-mêmes.

Voici un roman initiatique dans la plus pure tradition de ce terme. Avec "La Montagne magique" on pourrait presque dire que c'est le roman initiatique qui influença la littérature moderne. Vraisemblablement, il servit de référence à tous les grands auteurs subséquents du genre. Par contre, on se rend compte assez rapidement que ce livre ne fut pas écrit à notre époque. Tout d'abord, les digressions font référence à des questions bien propres à l'époque de Thomas Mann. La relativité, le temps, par exemple. Aussi, et ce n'est pas péjoratif, au contraire, c'est le style de l'auteur qui ne frappe pas par sa contemporanéité. En effet, chaque mot est judicieusement choisi, le roman est très littéraire sans même un soupçon cinématographique (comme on le retrouve trop souvent de nos jours). Le roman aurait pu facilement être linéaire, parce que ce genre en particulier nous offre souvent ce défaut, mais il ne l'est vraiment pas. Tout est nuancé, tout est beau.

En plus de l'oeuvre de Murakami, je vois "La Montagne magique" un peu comme le précurseur du roman de Gao Xingjian "La montagne de l'âme". Non seulement ont-ils un titre semblable où la montagne joue le rôle de métaphore, mais aussi, on découvre un personnage qui poursuit son exploration du monde des idées, de l'âme, de la philosophie. La narration est par contre différente de "La montagne de l'âme" parce que Thomas Mann utilise une narration plus classique, et aussi, le personnage principal traverse un peu malgré lui sa conscience (et son inconscient) alors que dans "La montagne de l'âme" le héros y allait d'une traversée plus physique de la vie.

Les digressions sont partout dans ce roman. La médecine, la science, la philosophie, la spiritualité, la psychanalyse, la métaphysique et bien d'autres sujets y sont traités. Il n'y a pas vraiment de thèmes principaux dans ce roman, tout est mélangé, les idées sont présentées de façons diverses. Et même s'il y a de nombreuses digressions, cela reste tout de même un roman. On n'est pas dans l'essai déguisé en roman.

Cependant, pour conclure, je dois dire que "La Montagne magique" m'a ennuyée plus souvent qu'elle m'a émerveillée. Je n'ai pas retenu beaucoup de ma lecture. Je croyais au départ que j'aurais un roman dans le style et du calibre de "L'homme sans qualités" de Robert Musil (deux auteurs souvent rapprochés), mais c'est incomparable tellement "L'homme sans qualités" est supérieur à celui-ci. Par contre, dans la deuxième moitié, les questionnements deviennent plus importants et cela sauve une première moitié ennuyeuse sur tous les plans. Elle m'a réconciliée avec ce roman, ce qui m'a permis de lui placer une note respectable.

9 commentaires:

  1. J'avoue aussi m'être un peu ennuyée à sa lecture. Je me souviens d'une description du bras de la belle dont est amoureux le héros, description belle et sensuelle, et des promenades rousseauistes à herboriser. J'avais trouvé que l'idée selon laquelle il faut apprendre à être malade, lors du début du roman, était bien trouvée. Mais pour le reste, je ne le relirai pas.

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  2. Ce serait très surprenant que je le relise moi aussi. Pourtant j'attendais beaucoup de ce roman...

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  3. J'avais 13 ans quand je l'ai lu (aujourd'hui j'en ai 65) J'étais depuis 2 ans enfermé dans un sanatorium avec une tuberculose généralisée. J'y suis restée 5 ans ! Il était mon livre de chevet. Ses pages ont corné sous mes doigts. Je n'oublierai jamais cette rencontre qui m'a conduit à tomber amoureuse de ma maladie, à l'aimer jusqu'au refus de mourir pour elle... Il est dans ma bibliothèque parmi les livres qui ont marqué mon esprit... Magique pour moi

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  4. Bonjour, je découvre ce blog. L'Homme sans qualités supérieur à La Montagne Magique ? Question de goût j'imagine, même s'il s'agit surtout de deux livres très différents qui ne devraient pas être comparés. Pour ma part, je préfère La Montagne Magique, un des plus beaux livres du monde, pour une raison assez simple : Mann est un grand styliste, là où le style de L'Homme sans qualités est un peu laborieux. La littérature, avant d'être des idées, c'est du style, car c'est le style qui produit le monde de l'auteur. Et le style de Mann est d'une sensibilité exceptionnelle. C'est par lui que passe son monde, et son interrogation existentielle sur sa place dans la société et le but de la vie, et c'est ce style qui crée l'atmosphère si particulière, unique, de La Montagne Magique, qui crée cette bulle temporelle qui vous emporte à la lecture. C'est un livre qu'il faut lire lentement, pour se pénétrer de ce style si pur (à la fois sensible et ironique) et de cette atmosphère, et il se peut qu'il ne soit plus dans l'air du temps, car notre époque préfère ce qui est rapide, mais cela restera toujours un des plus beaux livres du monde.

    Strum

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    1. J'ai vu ton commentaire sur le blog de l'intendant tanner (et je suis allé sur ton site plus tôt cette semaine) et même si Mann est selon moi parfois excellent, je ne partage pas ta grande admiration pour cet écrivain. Je crois que son style a mal vieilli alors que pour Musil, cela semble être le contraire. Mais je crois en effet que cela est une question de goût...

      à bientôt

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  5. Effectivement, les goûts et les couleurs. Pour moi, Mann reste un des plus grands stylistes de la littérature et je ne partage pas ton idée d'un style qui a "mal vieilli". Le style des grands auteurs ne vieillit pas (et c'est d'ailleurs comme cela qu'on les reconnait - même chose pour les grands cinéastes), car il est pour chacun indissociable du monde littéraire qu'ils ont créé. Pour avoir butiné dans tes commentaires, j'ai l'impression que tu es très attaché aux idées dans ton approche de la littérature (idées par définition relatives pour moi, car elles relèvent pour beaucoup de la croyance, personne ne pouvant par exemple prouver que Dieu existe ou n'existe pas). Mon approche est différente : pour moi, c'est l'atmosphère, le ton et l'esprit du livre (autant de choses créées par le style) qui comptent, bref le monde particulier de l'auteur, ce monde qui va me procurer des sensations et des émotions à la lecture et donc me faire mieux comprendre le monde réel. Musil, son style est parfois assez fonctionnel dans sa volonté de tout embrasser, manque un peu de la sensibilité poétique de Mann, c'est la limite de cet auteur.

    Strum

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    1. Je suis encore plus attiré par le style que par les idées, ça dépend de l'auteur que je critique ; si t'as le temps tu iras lire mes chroniques sur Virginia Woolf.

      Et pour le style qui "a vieilli" je suis en total désaccord avec toi, parce que c'est justement le plaisir (ou le déplaisir) de la littérature, de voir qu'un auteur est encore "lisible" de nos jours (ou pas). Il y a plein d'auteurs, de style, qui ont mal vieilli, mais qu'on ne connait plus parce qu'ils ne sont plus édités. Même les "grands auteurs" comme tu le dis. Par exemple, Sartre a mal vieilli selon moi Mais pour Mann, c'est certain que c'est seulement mes goûts et mon opinion (ce qui est le but de mon blogue soit dit en passant) ;-)

      au plaisir...

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    2. S'agissant du style qui ne vieillerait pas, je ne parlais évidemment que des grands auteurs et de Mann en l'occurence. Dire d'un style qu'il a "mal vieilli" c'est très péjoratif (et honnêtement, c'est un jugement de valeur trop vague et subjectif à mon goût) et je trouvais un peu immodeste de le dire à propos d'un écrivain universellement admiré comme Thomas Mann, notamment pour son style, qui marie une sensibilité poétique et une ironie teintée de mélancolie. :)

      Strum

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    3. D'accord avec toi mais je n'arrêterai pas d'écrire mes opinions pcq ça froisse quelques personnes. C'est une des choses que j'aime en littérature, de confronter mes opinions avec le reste de la toile. Et sur ce sujet, je te conseille les entrevues d'Harold Bloom, ma référence dans la critique. Un homme avec de fortes opinions. Pour ma part, j'écris très modestement, je fais juste ça pour le plaisir et rien d'autres. Je ne suis pas un "critique" professionnel et je le dis souvent sur le blogue.

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